Investissement locatif : les limites du dispositif « Duflot »

Le plafonnement des niches fiscales et celui des loyers brident le nouveau mécanisme.

Le « Duflot », dispositif destiné à succéder au « Scellier », en fin de vie au 31 décembre prochain, a été dévoilé dans ses grandes lignes cette semaine. Il devrait permettre aux acquéreurs d’un logement neuf de déduire de leur impôt sur le revenu de 17 à 20 % (le taux n’a pas encore été arbitré) de son prix, plafonné à 300.000 euros, s’ils s’engagent à le louer pendant au moins neuf ans. Les bailleurs devront aussi choisir des locataires aux ressources plafonnées, respecter un niveau de loyer inférieur de 20 % au marché local, selon un zonage qui reste à déterminer. Dans ces conditions, le nouveau dispositif va-t-il être plus ou moins avantageux que son prédécesseur ? Nos explications.

  1 La réduction d’impôt

Les taux de réduction actuellement en vigueur s’étagent de 13 % (sur neuf ans) pour un « Scellier », jusqu’à 21 % (sur quinze ans) pour un « Scellier intermédiaire ». Les nouveaux taux proposés – entre 17 et 20 % étalés entre neuf et douze ans -semblent donc attractifs, quelle que soit la décision finale du gouvernement. Pour 180.000 euros investis, la réduction annuelle (voir tableau ci-dessus) ne serait inférieure au « Scellier » actuel qu’avec une réduction de 17 % sur douze ans. Pourtant, les deux systèmes sont loin d’être aussi intéressants. En effet, le gouvernement projette de plafonner l’avantage tiré des niches fiscales à 10.000 euros par an dès l’imposition des revenus de 2012 (au lieu de 18.000 euros + 4 % des revenus actuellement). Ce qui devrait limiter le recours au dispositif.

Par exemple, si vous avez un employé de maison, vous avez droit à une réduction égale à 50 % des sommes à votre charge, dans un plafond de 6.000 euros (soit 12.000 euros dépensés en un an). « Comme ces dépenses sont inclues en 2012 dans les niches fiscales et a fortiori en 2013, il ne vous resterait plus que 4.000 euros de réduction disponible au titre du nouveau dispositif », prévient Jean-Dominique Delannoy, avocat associé au sein du cabinet Fidal. Par ailleurs, si vous bénéficiez en 2013 de réductions d’impôt au titre d’investissements en « Scellier » (ou autre dispositif défiscalisant) réalisés les années précédentes, ces dernières viennent aussi amputer le plafond de 10.000 euros. Selon le calcul du ministère du Logement, 90 % des acquéreurs de « Scellier » ne seraient toutefois pas gênés par cet abaissement du plafond des niches fiscales.

 2 Le rendement

Quel que soit le dispositif, l’avantage fiscal vient directement soutenir le rendement d’un investissement locatif. Avec le « Scellier », vous économisez 13 % d’impôt pendant neuf ans, c’est-à-dire 1,44 % par an. « Si vous avez emprunté à 4 % pour acheter le logement, il vous faudra au minimum un rendement de 4 % pour rentrer dans vos frais. En y ajoutant la réduction d’impôt, cela donnerait donc un rendement annuel de 5,44 % », explique Gilles Etienne, directeur du pôle expertise patrimoine chez Cyrus Conseil. Avec le « Duflot », selon les différentes hypothèses de calcul, l’avantage fiscal booste le rendement de 1,66 à 1,89 % par an. Ce qui est loin d’être négligeable. Mais gare aux apparences ! Les loyers autorisés dans le futur dispositif seront minorés de 20 % par rapport au marché local, avec des modulations à préciser en fonction de l’agglomération et du type de logement. « Cela réduit mécaniquement de 20 % le rendement de votre investissement. L’avantage fiscal est donc minoré », commente Gilles Etienne. Par ailleurs, les rendements risquent aussi d’être pénalisés par le zonage du « Duflot », qui devrait privilégier les marchés plus tendus, donc plus chers d’accès.

 3 Profiter du « Scellier » ?

« Avec les nouveaux taux de réduction, à première vue intéressants, l’Etat envoie un message fort aux investisseurs pour qu’ils soient, dès le début de l’année, sur le nouveau mécanisme », estime Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut du management des services immobiliers. De plus, les stocks de « Scellier » invendus sont faibles. De là à lui faire vos adieux ? Cela dépend où se situe le programme. Certaines zones éligibles au « Scellier » ne le seront plus au « Duflot ». Si vous y investissez, vous pourrez sans doute profiter de baisses de prix à l’achat, puis pendant neuf ans d’un loyer de marché sans plafond de ressources pour les occupants. Mais sans occulter l’essentiel : trouver un locataire, et évaluer vos chances de plus-value à la sortie. Dans les zones confirmées, plus tendues, les promoteurs transformeront sans doute le « Scellier » en « Duflot ». Dans ce cas, investir en « Scellier » peut vous faire obtenir une réduction d’impôt dès 2013. Si vous attendez le « Duflot », l’avantage fiscal sera plus tardif (il jouera sur l’impôt 2014). Mais comparez bien les deux dispositifs avant de vous décider.

Sources : Lesechos.fr 21/09/2012

Écrit par Edouard LEDERER
Journaliste Finances persos

Écrit par Catherine SABBAH
Journaliste